Terrorisme et souterrains

Patrimoine Mondial


​De tout temps, l’homme s’est réfugié en mode souterrain, soit pour résister, soit pour survivre. Les forces armées de Daesh n’échappent pas à la règle. Elles ont occupé Mossoul (Irak), détruit nombre de vestiges religieux (juifs, chrétiens et musulmans) et historiques, ainsi les tells de Nebi Yunus et la mosquée de Kuyunjik, sur la rive orientale du Tigre. On les a vus détruisant au marteau-piqueur les statues de taureaux ailés androcéphales gardiens de la porte de Nergal, l’une des principales portes de la muraille protégeant la ville antique de Ninive. Malgré les assauts des guerres modernes, parfois le Patrimoine résiste, par miracle.


Une découverte inattendue

Janvier 2020, les djihadistes sont difficilement chassés de Mossoul et très vite une équipe d’archéologues se rend sur place pour faire un état des lieux. Elle découvre, sous la mosquée élevée à l’emplacement du tombeau de Jonas, un réseau de souterrains et de tunnels creusés pour les besoins de Daesh menant à un palais assyrien datant du VIIe siècle avant J.-C. qui n’avait jamais été exploré auparavant.
Les archéologues irakiens mettent au grand jour des murs, des statues monumentales de taureaux ailés androcéphales identiques à ceux que l’on trouve à l’entrée de tous les autres palais assyriens, et un surprenant bas-relief représentant quatre femmes de face.
 
 

 

Le tell Nebi Yunus

Un tell, site en forme de monticule, résulte de l'accumulation de matières et de leur érosion sur une longue période, sur un lieu anciennement occupé par les hommes. Il s'agit d'une colline artificielle formée par les différentes couches d'habitations humaines. Les premiers tells apparaissent au Néolithique, au Proche Orient. Certains sont encore occupés aujourd'hui.
Le tell Nebi Yunus n’avait pas fait l’objet de fouilles intensives en raison de la présence de la mosquée, lieu de pèlerinage, et d’un village construit en son sommet.
Les textes et archives relatent l’existence d’un arsenal, d’extensions de la construction  dans le but d’y mettre à l’abri chevaux, mules, équipements militaire et butins de guerre…
L’un des deux palais a sans doute été découvert par les djihadistes et probablement pillé : un état des lieux sous l’égide de l’Unesco a révélé un patrimoine culturel important mais détruit à plus de 70% !
Le monument souterrain, mesurant 450 mètres de long et entre 200 et 300 mètres de large, a été retrouvé sous les décombres d’une mosquée érigée sur le Tell Nebi Yunus, colline artificielle du sud de Ninive, à Mossoul, dynamitée en 2014 par l’État islamique. La salle du trône, au sein de laquelle le roi Assarhaddon (de – 680 à – 669) recevait ses visiteurs juché sur un siège de 55 mètres, serait la plus grande de l’empire assyrien connue à ce jour, selon l’archéologue à la tête du chantier, Peter Miglus. Depuis le début des fouilles, en 2018, ce dernier soupçonnait déjà que le tunnel aurait également été creusé pour le vol et la revente d’artefacts du palais sur le marché de noir : « Cela devait en valoir la peine, sinon ils n’auraient pas creusé un réseau de tunnels dense avec d’énormes dépenses énergétiques pendant deux ans », signale-t-il.
La mosquée sera reconstruite et intégrée au palais royal assyrien, liant ainsi l’Orient ancien à l’islam. Les fouilles, dont la durée était fixée à cinq ans, ont été mises à l’arrêt pour une durée indéterminée en raison de la pandémie du coronavirus.


Rédigé par Patrick Edgard Rosa le Mercredi 6 Mai 2020 à 17:01 | Lu 338 fois




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