Paris, frigidaires en souterrains (2)

Le froid conservé


L’âge d’or des glacières se situe au 19ème siècle, à Paris, avec l’essor de la Glacière de Saint-Ouen et celle du Bois de Boulogne. Mais le déclin s’annonce très rapidement. Les glacières de Paris étaient des entrepôts de Paris où on entreposait de la glace en hiver pour la redistribuer à ceux qui en avaient besoin durant le reste de l'année.


Approvisionnement

Plusieurs cours d’eau et lacs sont utilisés pour cette fonction très… parisienne. Ainsi la Bièvre qui prend source à Guyancourt et qui se jette dans le collecteur principal des égouts de Paris : un de ses bras alimentent différents bassins dont l’un était réservé à fournir la glace qui se consomme en été dans Paris. L'eau avait peu de profondeur et gelait facilement. Les blocs de glaces étaient conservés dans plusieurs glacières situées dans le voisinage. A cet effet, on creusait de grands puits en maçonnerie, on y descendait la glace et on recouvrait de terre, et l'été, on déterrait la glace parfaitement conservée.

La Société des glacières de Paris

La ville de Paris était approvisionnée par 40 glacières dont celle de Gentilly, Saint-Ouen, mais également en cas de défaut d'approvisionnement, de Norvège. Elles étaient principalement établies du côté d'Auteuil, de Boulogne et du Puit de Passy : 


« Les forages de ce dernier ayant indiqué pour la composition du sol un banc île roche de 15 mètres d'épaisseur reposant sur une couche de sable granuleux, ce terrain a paru le plus convenable pour établir les glacières, les matériaux de construction étant fournis par le sol lui-même, et l'eau provenant de la fonte des glaces trouvant un écoulement facile dans les sables sous-jacents.
Une fouille a été effectuée de 70 mètres de longueur sur 30 de largeur et 15 mètres 50 de profondeur. Cette immense excavation de 32 550 mètres a été divisée en dix compartiments formant des cubes de 12 mètres de côté et contenant chacun l million de kilogrammes de glace, soit 10 millions pour l'ensemble ; mais comme on admet un déchet de 50 pour cent, ou ne compte que sur 5 millions livrables. »
 

Glacière de Saint-Ouen
Après la guerre on retrouva à Saint-Ouen, lors de fouilles, le traces d'une ancienne glacière inconnue des gens du quartier. Ceci prouve qu'on recueillait depuis longtemps de blocs de glace sur la Seine à Saint-Ouen. La grande glacière, la plus grande des environs de Paris fut établie par M. Lenoir au 19ème siècle. C'était un puits de dix mètres de profondeur sur trente-trois de diamètre. On y a là produit de la glace artificielle suivant un nouveau procédé : « Les procédés employés étaient ceux d’évaporation. L'eau, amenée par des pompes au sommet de gradins en charpente, descendait en cascades par nappes minces, et, coulant lentement dans de vastes bassins isolés du sol, achevait de se congeler. On a obtenu de cette manière des masses considérables de glace lorsque la température atmosphérique était à quelques degrés de zéro. »
La glacière contenait millions de livre de glace et pouvait en contenir plus du double. On prenait les blocs de glace dans la Seine et dans le Canal Saint-Denis. Le procédé devait rendre la glace bien moins coûteuse puisque le dépôt se trouvait plus proche de la capitale, elle fondait donc moins. Elle était destinée à une grande consommation. Elle servait à remplir les vases autour des bouteilles (« seaux à champagne », etc..) et de carafes à rafraîchir, à rafraîchir les denrées, les glaces enfin. La glace était portée à domicile.
La nouvelle glacière différait de toutes les autres par son étendue (cent pieds de diamètre) et offrira aux consommateurs une fontaine qui conserve du matin au soir, à la température de zéro, la quantité d'eau nécessaire pour la consommation d'un jour, ainsi que les autres liquides que l'on veut rafraîchir. Dans cet appareil, la glace produit le maximum de son action.
(Revue encyclopédique 1926).
 
 
La Glacière de Boulogne
 La Glacière du Bois de Boulogne était connue depuis longtemps sous ce nom. Située près du lac, construite en 1857 par la Compagnie des rafraîchissements, elle faisait soixante-dix mètres de longueur sur quarante mètres de largeur, avec une profondeur en proportion. Une charpente en bois, élevée d'après un système américain et recouverte d'une toile goudronnée, abritait de nombreux ouvriers qui y étaient occupés. Elle pouvait contenir jusqu'à dix mille tonnes de glace, quantité supérieure de deux mille à la consommation habituelle de Paris (huit mille tonnes).
« Les froids exceptionnels que nous venons de subir préparent à la ville de Paris des bénéfices considérables. On a parlé, dans divers journaux, des immenses glacières que l'administration a faites élever sur la commune de Passy (laquelle est, à compter d'aujourd'hui même, le XVIe arrondissement de la capitale). Ces glacières, situées entre la tranchée du chemin de fer qui porte à l'avenue de l'Impératrice, et à celle des fortifications, en face du puits artésien, sont, à cette heure, remplies de la glace prise à la mare d'Auteuil et surtout dans les lacs du Bois, transportée par des centaines de charrettes qui ont, pendant quinze jours, occupé des milliers d'hommes. Ces glacières contiennent quarante-cinq millions de kilogrammes de glace. La ville vendant chaque kilo dix centimes, c'est quatre millions cinq cent mille francs de produits»
( no 142 du 31 décembre 1859 du Monde Illustré)

A cette époque naît la « fée électricité » et la fabrication des premiers congélateurs artificiels. La technologie sonne le glas de ces sites pittoresques. Mais il existe encore à Paris quelques glacières en l’état, à Bagatelle, dans les jardins de l'hôtel de Matignon et une troisième dans l'hôtel des Ambassadeurs de Hollande.
Le château de Versailles possède également une triple glacière tout à fait admirable, laquelle en cas de pénurie pouvait recourir à d'autres annexes dans les environs, ce qui démontre bien l'engouement de cette consommation à la cour des grands.
(source file:///Users/edgard-rosa/Desktop/Sujets%20portail/Glacières/Glacières.htm)


Rédigé par Patrick Edgard Rosa le Lundi 4 Septembre 2017 à 11:53 | Lu 833 fois