Les troglos de « l’île du diable »


Carnet de séjour 2. Embarquement pour Cythère. Les passagers du vol maritime à destination de Santorin sont invités à débarquer… sur l’île aux cent visages.
Tout n’est que violence, hautes lumières et contrastes dans cette ultime île située aux confins des Cyclades. Son histoire est une suite ininterrompue d’irruptions volcaniques : entre 198 av-JC et 1956, quatorze irruptions ont jalonné l’histoire de Santorin. Ce sont les Francs qui ont baptisé ainsi cette contrée, laquelle a abrité avant leur disparition les populations de Stronghylé, la civilisation minoéenne. Les Byzantins, les Ottomans , les Vénitiens ont tour à tour laissé leurs empreintes. Peut- être est-ce là la raison qui a poussé les habitants de l’île habitués aux passages à développer fortement le tourisme. Le troglodytisme a essaimé de longue date sur cette terre de vicissitudes : peu de pierres pour un habitat en surface, dur, pas de moyens de transport et par contre une roche facile à creuser, développant des sortes de niches, d’alvéoles précédées d’une sorte de tunnel, avancée semi troglodytique d’au moins d’environ trois mètres pointée sur la mer.


Le troglodytisme renaît de ses cendres

Les troglos de « l’île du diable »

1956 : le dernier tremblement de terre en date détruit Santorin. « Patience, patience, embûche après embûche, cette montée aussi conduira à une descente ». Cette « mantinade» (poème de deux vers en dialecte) est fredonné par tous les Santoriniens. Elle révèle cet instinct de survie face à l’adversité. L’âne est l’animal roi ici, tout se fait à dos d’âne, y compris les touristes remontés sur le haut de la falaise. Modernité oblige, le téléphérique apparaît à Théra : « Down monkey ; Up, teleferic ! » scande un muletier à notre approche. Sortis de leurs « tannières » détruites, les habitants (plus de la moitié vivaient sous roche) prennent conscience de la plus-value touristique que représentent leurs « scaftas » (nos troglos). S’y adjoignent quelques étrangers amoureux , quelques propriétaires de ruines. Rajoutez un soupçon de volonté municipale et politique. La recette prend, comme à Matera en Italie. L’île s’électrifie, se restaure, se loue. L’afflux touristique devient une denrée majeure tandis que le cours de la petite tomate s’effondre.


Notes de voyage

Les troglos de « l’île du diable »
Nous avons élu domicile à Oia au nord de l’ile-croissant. Notre sweet home fait partie de la dernière frange habitée. Toits terrasses, patios ombragés, havres de repos face à la mer dans le silence, voila notre ordinaire quotidien, fruit de la reconstruction engagée.                                                                                                                                                       
En dessous, rien, la falaise abrupte qui plonge vers la mer. Un sentier (qui serait interdit à toute forme de circulation, arrété municipal affiché, de par chez nous) conduit à la mer et aux cabanes de pécheurs creusées. Celles construites au niveau de l’eau abrite les embarcations, le matériel de pêche. Celles situées quelques mètres plus haut abrite des habitations temporaires avec le minimum requis, une paillasse creusée dans la roche, éventuellement un réfrigérateur.
 Au dessus, au delà des cinquantaines de marches à franchir, qui délimite le noman’s land des habitations, notre monde de silence, la « chape » dévolue aux touristes de passage, rues scintillantes de mille feux et mille nuits attractives, commerce oblige.
A suivre.

Mister Trog pour les textes, Lady Trog pour les images.


Rédigé par Patrick Edgard Rosa le Jeudi 30 Juin 2011 à 19:59 | Lu 421 fois