Les carrières au long cours de Fleury-sur-Orne

Pages d’ Histoire


L’actualité immédiate fait ressurgir du passé des univers souterrains méconnus. En l’occurrence, et grâce aux commémorations du 6 juin sur les tragiques plages normandes, nos oreilles attentives et notre grande curiosité ont focalisé notre attention sur la commune de Fleury-sur-Orne.
Bonne pioche, les carrières de la région, fermées au public recèlent une longue histoire : du site d'extraction de la pierre de Caen exploité durant des siècles à la période actuelle où seulement une partie de ces caves est dévolue actuellement à la culture du champignon de Paris, les souterrains restent dans la pénombre des mémoires.
Mais le voile se relève avec le vent de la libération en juin 45. Les archéologues se penchent sur ces vestiges et sur l’utilisation des souterrains refuges en temps de guerre.


Le « Carreau d’Allemagne »

Au XIe siècle, le « carreau d’Allemagnes » était l’un des principaux lieux d’extraction de la pierre de Caen. L’exploitation, à ciel ouvert servit à la construction de nombreux édifices en Normandie (par exemple les abbayes de Caen) ou en Angleterre (tour de Londres).
« La pierre de Caen est exploitée depuis l'époque antique. On sait qu'elle a été utilisée en volume important pour réaliser les sarcophages mérovingiens aux VIe et VIIe siècles, mais on connaît en revanche très mal l'histoire de son extraction au cours du premier millénaire », explique Laurent Dujardin. Auteur d'une thèse de doctorat en histoire et archéologie sur les carrières de pierre en Normandie (1998), puis de plusieurs publications sur le cas particulier de « la pierre d'Allemagne et les carrières souterraines de Fleury-sur-Orne », il est le principal spécialiste du sujet.

Le développement de la ville de Caen, à partir du XIe siècle, correspond au début de l'âge d'or de la pierre de Caen. Le grand bâtisseur qu'a été le duc Guillaume (alias Guillaume le conquérant) a assuré l’essor de la ville, et a exporté exportée ses créations en Grande-Bretagne, utilisée par exemple sur le chantier de la Tour de Londres, à Canterbury ou encore à Westminster...
Près du stade de Fleury, une descente droite et en pente douce témoigne de la longue histoire de l'extraction de la pierre de Caen : « C'est la tirée, qui permettait la sortie des blocs de pierre sur des chariots tirés par des chevaux. ». L’industrie a progressivement été abandonnée au XXe siècle. Déclin oblige : Les carrières des Coteaux de Fleury ont également abrité (jusqu'en 2013) des champignonnières, profitant de conditions idéales : fort taux d'humidité et température constante dans les galeries.

Souterrain refuge

Il est de mise pour tout souterrain refuge qui se respecte, de ne laisser aucune trace : de manière générale, les occupants remontaient à la surface avec tous leurs effets. Dans le cas de Fleury sur Orne, le contexte est différent. Nous sommes à la fin de la seconde Guerre Mondiale : « Le 6 juin 1944, les deux frères Saingt étaient au milieu de la route d'Harcourt pour inviter les Caennais à se réfugier chez eux. Ils en ont hébergé un millier pendant un mois ! », rappelle Laurent Dujardin.
Cette année marque le 75e anniversaire du Débarquement : À partir du 6 juin 1944, un millier d’habitants trouvent refuge dans une carrière près de Caen, fouillée depuis quatre ans. Les archéologues offrent un nouvel éclairage sur le Jour J et la bataille de Normandie.
« De part et d’autre des chemins, s’étalent des centaines d’objets dans un désordre figé : tête de poupée, bouts de film, morceaux de porcelaine, pièces de monnaie, bijoux et fioles, chaussures, fourchettes… Un vélo rouillé semble encore attendre l’élan d’un pied enfantin tandis qu’à l’abri d’une cavité repose une paire de lunettes, intacte. Les traces de paille désignent l’endroit où l’on a tenté de dormir, les foyers, l’espace où l’on se serrait pour se réchauffer. Une histoire, vieille de soixante-quinze ans, se dévoile peu à peu. »
« Les Alliés débarquent et la bataille de Normandie commence. Sur Caen et les villes alentour s’abattent une nuée de bombes, destinées à ralentir les mouvements des unités allemandes. Au sud de Caen, dans la commune de Fleury-sur-Orne, les frères Saingt, brasseurs de leur état, agissent dès le 5 juin. Prévenus par la BBC, ils ouvrent leurs caves et cette carrière, creusée au XIXe siècle sur deux hectares environ, à la population en fuite.»
 
 
Vous pourrez lire le détail de cette histoire  sur : https://www.la-croix.com/France/Sous-terre-autre-histoire-Debarquement-2019-06-05-1201026828?from_univers=lacroix
Repérée par l’archéologue Laurent Dujardin et le spéléologue Damien Butaeye dans les années 2000, la carrière Saingt a été fouillée depuis 2015. Chaque recoin, chaque objet a été enregistré afin de construire un modèle 3D destiné au grand public. Car désormais, le lieu va retourner à sa vie secrète. Les archéologues n’y reviendront que tous les cinq ans pour enregistrer la décomposition des vestiges et enrichir leurs interprétations d’abris plus anciens.
A retrouver sur www.troglonautes.com
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Rédigé par Patrick Edgard Rosa le Mercredi 12 Juin 2019 à 13:12 | Lu 1532 fois




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