Lascaux, de fond en comble (3)

Culture, environnement et technologie


Dans les deux sujets précédents, nous avons relaté à grands coups de pinceaux la période préhistorique du site de Lascaux, et constaté qu’il aura fallu quelques décennies pour mettre en péril un site vieux de quelques vingt mille années. L’enjeu était de taille, préserver le passé et mettre en place un futur organisé pour la préservation d’un site inestimable pour les hommes modernes que nous sommes. Quel avenir attend Lascaux placé sous monitoring, ainsi que ses clones ?

Conséquences à court terme : une connaissance approfondie du milieu souterrain.
Deux éléments ont été essentiels pour maîtriser la sauvegarde du site : l’air et l’eau intimement liés dans les processus de dégradation, qu’ils soient biologiques, mécaniques, ou minéraux. L’eau s’infiltre dans la grotte, ruisselle et s’évapore. L’air chargé de vapeur en forte teneur en CO2 accélère la dissolution de la roche et engendre des précipitations sous forme de calcite. Toutes ces modifications affectent les parois ornées.


Méthodes de recherche et préconisations

Après la fermeture en 1963, les recherches fondamentales et pluridisciplinaires autour de la conservation sont mises en place. La grotte mise sous monitoring et les paramètres engrangés sont étudiés et servent à la compréhension globale de l’équilibre fragile de ce monde souterrain. Tout ce qui touche à la grotte et son environnement est pris en compte.

Un outil « révolutionnaire »

La grotte ornée est calquée, numérisée puis reconstituée. Lascaux a même été clonée numériquement pour parfaire la copie "Lascaux 4". Ce clone permet :
  • Aux conservateurs de circuler dans le modèle autant que de besoin
  • Aux chercheurs de disposer d’archives alimentées par nombre d’observations et de prises d’échantillons
  • Aux scientifiques de mener des expériences notamment pour comprendre les transferts de masse d’air de chaleur… et maîtriser la présence humaine analysée
  • Au grand public par des visites immersives sur écran ou sous un casque de réalité virtuelle (au top ! votre serviteur l’a essayé : vertigineux !)
L’analyse précise du site a révélé des gravures inédites qui n’avaient pas été détectées auparavant.



 

Une réflexion globale de prise en compte de l’environnement et la maîtrise du foncier

Les témoignages du passé font l’objet d’une attention et d’une prise en charge sans faille en terme de responsabilité publique collective. Cette responsabilité en France est celle de l’Etat, soit qu’il soit propriétaire ou qu’il vienne en soutien technique, scientifique ou financier.
C’est la manifestation législative, règlementaire et juridique d’un intérêt reconnu comme général et comme le résultat d’expériences de gestion de cette catégorie de patrimoine. Le dispositif inclue tous les services du Ministère de la Culture (DRAC, CRMH…).

Les propriétaires de grottes ornées sont dorénavant soumis à de nouvelles lois.

Maîtrise foncière publique d’un bien national : nouveauté législative introduite en 2003.
Cette disposition va à  l’encontre du droit civil en France qui affirme que « un propriétaire l’est de la surface du terrain jusqu’au centre de la terre ».
« La Loi de l’archéologie de 2001 modifiée en 2003, confortée depuis la loi liberté, création, architecture et patrimoine (dite loi LCAP) du 7 juillet 2016, réintégrant dans sa rédaction les conclusions d’une jurisprudence en Conseil d’Etat (dossier grotte de Vilhonneur, Charente) viendra à terme rendre automatique la notion de propriété publique de l’Etat pour les vestiges immobiliers d’importance, dont les grottes ornées (art.L541-1 et 2 du Code du Patrimoine. »
Lascaux s’inscrit dans ce cadre : propriété privée ouverte au public, désordres conservatoires, reprise en main par l’Etat (fermeture su site), acquisition foncière, accord avec le propriétaire lui permettant de créer un fac-similé, puis sanctuarisation de la colline.
Ce dispositif pourra à terme servir de modèle pour les découvertes à venir.


Rédigé par Patrick Edgard Rosa le Dimanche 25 Mars 2018 à 13:21 | Lu 220 fois