Global Seed Vault, une arche de Noé végétale

Norvège


Savez-vous qu’au fin fond de la Norvège, sous des sous-sols gelés, se cache une arche de Noé de la biodiversité agricole de notre planète ? Dans l’île de Spitzberg, une des nombreuses îles de l’archipel du Savlbard, au-dessus du cercle polaire, des graines venues de toute la planète sont conservées dans un bunker souterrain.


Un conservatoire internationale de la végétation

Le Global Seeds Vault a été créé à l’initiative de Cary Fowler, agronome américain. Dès 1996, il tire la sonnette d’alarme sur les risques de disparition des espèces agricoles liés au changement climatiques, aux désastres naturels qui en découlent souvent, et aux guerres qui peuvent faire disparaître des espèces végétales endémiques. Même s’il existe des greniers à grains ou des laboratoires dans de nombreux pays qui conservent les graines destinées à être réutilisées en cas de pénurie, aucun lieu n’est à l’abri d’un désastre qui détruirait à jamais des espèces locales. C’est ce qui a failli se passer ces dernières années en Syrie quand la banque de semences d’Alep est tombée aux mains de l’Armée syrienne libre.  Des semences d’orge, de lentilles ou de pois chiche spécifiques au Moyen-Orient ont failli disparaître. Heureusement, l’Icarda (Centre international de la recherche agricole dans les zones arides) avait déposé dans la chambre forte du Svalbard des copies de milliers de graines. Celles-ci, ainsi sauvegardées sous la glace du Pôle, vont permettre de faire revivre des terres dévastées par les conflits. L’Afghanistan a en revanche perdu ses réserves de graines pendant la guerre...

Un bunker sous le Pôle

Le combat de Cary Fowler a abouti à la création du Global Seeds Vault en 2008, géré par l’ONG Crop Trust et le gouvernement norvégien. Dans un décor de bout du monde, des hommes s’affairent autour d’une rampe de béton qui plonge sous la terre, dans une ancienne mine de charbon. Le coffre-fort végétal est situé à 120m sous la terre gelée et n’est ouvert que quelques fois par an pour y ranger des caisses de graines venues de Colombie, du Moyen-Orient… ou de la Corée du Nord. La France a également signé un accord avec le GSV en 2016 et n’a pour l’instant déposé que 2 sortes de blé. La Chine, l’Espagne ou le Brésil sont encore aux abonnés absents.
Des essais positifs de germination sont effectués à partir des graines conservées dans ces conditions souterraines. Correctement séchées et conservées, les graines peuvent, selon les espèces sommeiller plusieurs dizaines, voire centaines d’années, avant de renaître.

Les caisses sont scellées et déposées dans la chambre forte à la température de -18°c. Aucune équipe scientifique ne travaille dans ce hangar souterrain géant, bien gardé à l’extérieur et dont les portes ne s’ouvrent que 3 à 7 fois par an. Ici, aucun risque de se faire dérober les réserves de graine. Les ours sont les seuls êtres vivants à partager la vie des gardiens, et il fait nuit 4 mois par an. Haricots, oignons, pommes de terre, orge, blé, riz ou carottes, toutes les espèces nécessaires à la survie de l’humanité sont ici conservées et à l’abri des destructions humaines ou naturelles.

Souterrain refuge en danger

Les chiffres sont impressionnants : 890 886 échantillons sont stockés dans le coffre, dont 500 graines en moyenne par échantillon, soit 445 millions de semences. 73 organisations ont procédé à des dépôts depuis l’inauguration en 2008 : Etats, ONG, laboratoires privés ou publics, tous sont les bienvenus au service d’une même cause, la préservation de la biodiversité.
 
On peut ainsi parler de souterrain refuge, non pas pour les humains mais pour les plantes.
Comme les archives les plus précieuses conservées dans les anciennes mines de fer à Iron Mountain aux Etats Unis, cette démarche démontre encore une fois que la préservation de notre mémoire passe par cet enfouissement souterrain, à l’abri de la lumière, à température constante et sous la protection de la plus fiable des sentinelles, la roche.
Cependant, un risque vient perturber ce projet de préservation construit à toute épreuve : la fonte du permafrost, plus rapide que prévu, et qui peine à se reconstituer, provoque des infiltrations dans le site et il a fallu construire des parois étanches et pomper l’eau qui risquait de perturber l’équilibre climatique de ce frigidaire naturel. Faudra-t-il s’enfouir toujours plus profond pour protéger l’humanité, préserver nos ressources et l’avenir de la planète ? La réponse est entre nos mains.
 


Rédigé par Renée Frank le Samedi 17 Février 2018 à 11:09 | Lu 397 fois




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