Datong, Chine

Les grottes bouddhiques de Yungang, lieux de cultes


La Chine recèle de nombreux sites extraordinaires témoins de l’arrivée du bouddhisme depuis l’Inde par la route de la Soie. Nous vous avons présenté les grottes de Mogao sur le site de Dunhuang (article 2107), situées dans le désert de Gobi et creusées un siècle avant Yungang. Il s’agit de grottes aux décors peints destinées à conserver des rouleaux de prières (sutras). En revanche à Yungang, près de la ville de Datong, dans la province du Shanxi, à quelques 300km à l’ouest de Pékin, les grottes creusées dans le calcaire sont remarquables par leurs sculptures monumentales. Visite guidée.


Un Bamiyan chinois

Les grottes de Yungang répertoriées sont au nombre de 53 et abritent plus de 50 000 statues. Elles représentent l’apothéose de l'art rupestre bouddhique en Chine au Ve siècle (dynastie barbare des Wei du Nord). Parmi elles, les Cinq Grottes, réalisées par le moine Tan Yao venu des confins de l’Ouest, offrent  une stricte unité dans le plan et la conception.
En survolant la région en avion, on aperçoit des volcans éteints et d’étranges failles profondes et très découpées comme une  dentelle ou de délicates cicatrices recouvrant le paysage. Il s’agit probablement des traces d’un tremblement de terre récent qui témoignent de l’instabilité géologique de la région. Les grottes ont été creusées le long d’une falaise de calcaire sur plusieurs centaines de mètres, le long d’une rivière aujourd’hui asséchée.

Le style  des sculptures combine à la fois les formes de l'art traditionnel chinois et des influences étrangères : après avoir traversé la Perse, le style hellénistique est parvenu dans le Gandhara, au nord de l’Inde actuelle où il s’est fondu dans les traditions locales. De là, le bouddhisme a été exporté par les marchands le long de la route de la soie jusqu’en Chine. On retrouve donc ici les mêmes visages allongés et les drapés des bouddhas martyrs des grottes de Bamiyan en Afghanistan. La disparition de ceux-ci rend d’autant plus précieux les témoignages conservés à Datong.

Des grottes fragiles et menacées

On raconte que le président Pompidou, en visite à Datong avec Zhou En Lai en 1973, aurait alerté son homologue chinois sur la valeur inestimable et universelle du site. A l’époque, les bergers laissaient encore leurs bêtes s’abriter dans les grottes. Quelques archéologues occidentaux  avaient déjà étudié … ou pillé le site. Certaines statues seraient aujourd’hui  « conservées » au MET à NY ou au musée Cernuschi à Paris… Hélas, la dégradation est déjà très avancée, sans compter les dégâts dus aux tremblements de terre. La tentative de protéger le calcaire par une couche d’argile fixée par des pieux de bois enfoncés dans la roche s’est soldée par l’érosion de l’argile, le pourrissement du bois et le ravage des statues comme vérolées par l’ignorance des hommes. Pire encore, la mine de charbon, située de l’autre côté de la rivière, avait entièrement recouvert les bouddhas de poussière de charbon. Aujourd’hui encore, la mine continue de fonctionner, mais seulement à 30% de ses capacités… Le lac artificiel creusé pour agrémenter le parcours touristique amène une humidité néfaste à l’équilibre des grottes. A l’origine, les grottes étaient protégées par des toitures  constituant d’élégants pavillons de bois accolés à la falaise et protégeant les sculptures des intempéries. La plupart ont disparu ou ont été reconstruites. Celles encore visibles sur le site datent du 16ème … ou du 21ème siècle.  Heureusement, les grottes de Yungang sont inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 2001. Mais le péril demeure.

Le sourire du Bouddha

Il faut imaginer ces sculptures polychromes, ces grottes aux décors de plafonds à caissons entièrement décorés et peints. Les yeux des bouddhas étaient faits de cristal de roche et devaient briller au clair de lune… à travers les fenêtres creusées dans la falaise.
Les 5 grands bouddhas qui se succèdent représenteraient 5 rois barbares de l’époque. Toutes les sculptures sont monolithes et creusées dans des cavités de plus de 15 mètres de haut. Les artisans ne connaissaient pas le principe de l’échafaudage et commençaient à creuser du haut vers le bas à partir d’un trou creusé dans la partie élevée de la falaise. D’autres statues de dimensions plus modestes ont des traits plus raffinés et l’une d’entre elles, un boddhistava perché sur un chapiteau,  sourit de ce sourire universel que l’on retrouve sur l’ange de la cathédrale de Reims…
Et toujours ces drapés, ces visages ou ces coiffures qui semblent venus des confins de la Grèce ou de la Perse, après avoir traversé les déserts de l’Asie centrale et l’Inde…
La promenade sur le site  des grottes de Yungang est émouvante comme souvent le sont les témoignages de la ferveur des hommes d’autrefois et qui gardent le mystère de leurs origines.

Pour accéder à Datong, un seul vol depuis Pekin tôt le matin. Sinon, prévoir plus de 5 heures de route. Un train à grande vitesse est en projet, d’autant plus que la ville se développe de façon spectaculaire autour de projets culturels et de restaurations d’envergure (il y a même un musée en cours d’achèvement construit par Norman Foster…).
 
L.T.
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Rédigé par Renée Frank le Mardi 7 Juin 2016 à 08:17 | Lu 351 fois




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