La spiritualité des grottes


L'expérience des grottes marocaines est celle d'une retraite spirituelle, une expérience unique : face à l'océan et dos au désert. Elle inspire la sérénité et les mots murmurés pas la mer. L'ambiance à la bougie ajoute la magie des lieux, en symbiose avec le cycle du jour et de la nuit.


A marée montante

A marée montante, je contemple la mer.
A marée montante, on guette la montée des eaux depuis le balcon de falaise, à la porte de la grotte.
Tu contemples le spectacle de l’océan, pas besoin de descendre sur la plage. Tu l’embrasses du regard, devant, à gauche, à droite, jusqu’à la pointe qui ferme la baie. Plus tard, il y aura les feux des bateaux de pêcheurs, si la mer se calme. C’est elle qui décide.
C’est comme un jeu où tu paries en estimant la force des vagues : cette fois-ci, elle va passer par-dessus la barre de rochers et les mares tranquilles vont renouveler leur vivier. Non, tu as perdu, ce n’est pas encore la bonne ; et tu encourages la mer à monter, plus haut, toujours plus haut, afin de purifier le sable, et d’effacer les quelques pas du jour. Et, juste là, en biais depuis la rambarde de la terrasse, tu observes l’écume qui pénètre par le goulot entre deux rochers, comme un bain moussant, OBAO.Tu te surprends à avoir envie de fumer, là, face au soleil qui descend, aux environs de six heures du soir. Tu sens la fraîcheur qui s’installe. La lumière s’enfuit avec les nuées de nuages roses. Alors, il est l’heure d’allumer les bougies, une pour la paillasse de la cuisine et l’autre pour la table du salon.
Mister Trog se met aux fourneaux. Il prépare un tajine au poulet. D’abord, allumer le brasero au charbon de bois, et puis découper les légumes, faire mariner le poulet frais découpé du marché avec des épices… Prévoir 2 heures de cuisson. On boira des coups en attendant, peut-être faire signe au voisin, solitaire ce soir. D‘autant plus que nous avons décoté l’estaminet presque secret où se fournir en liqueur. Un petit goût d’interdit ou du moins de transgression donne une saveur toute particulière à ce petit verre de vin…

Hommage à la chandelle

Ici, dans la grotte, il n’y a pas l’électricité. Je n’écris pas : « il n’y a pas encore l’électricité », car, même si tu peux choisir d’y installer un panneau solaire, il est préférable de garder la magie des soirées éclairées à la chandelle. Il faut se préparer pour la nuit, poser les objets à leur bon emplacement, anticiper les nuits sans lune. Ce soir du 24 décembre, celle-ci n’est pas encore levée. Pourtant, la mer est luminescente, sous la lumière des étoiles. Mister Trog écrit sous son parasol, à la lueur de la bougie, lampe frontale en action. Le brasero bat comme un cœur, concentré de chaleur, et le fumet du tajine attire les chats alentours.
A l’intérieur aussi, la chandelle apporte le mystère et danse sur les parois de la grotte chaulée de blanc. Elle diffuse la pensée et la chaleur, concentre la  nuit, inspire confiance en les ténèbres. Elle apaise, elle poétise. Nous l’avons trop oubliée dans nos civilisations électriques.
A la lueur de la bougie, une scène anodine devient tableau de maître. Une parole devient prière. Le sacré envahit le profane. Le temps suspend son vol. La nuit n’a plus de prise sur tes rêves. La grotte te protège, elle veille sur ton sommeil.

 
Lady Trog, un soir de Noël à Aglou


Rédigé par Renée Frank le Samedi 11 Janvier 2014 à 09:24 | Lu 360 fois




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